• LA PROIE

    Synopsis : Un braqueur s’évade de prison pour traquer son ancien codétenu, un tueur en série qui a entrepris de lui coller ses crimes sur le dos. Une policière de la Brigade des Fugitifs se lance à la poursuite du braqueur, devenu bien malgré lui l’ennemi public numéro 1. Quand chacun des protagonistes aura été au bout de lui-même, qui sera le chasseur, et qui sera la proie ?

    De Eric Valette avec Albert Dupontel, Alice Taglioni, Stéphane Debac, Natacha Régnier

    Nouveauté

    Interdit au moins de 12 ans


    Albert Dupontel est un acteur sur lequel on peut parier à coup sûr et qui sait tout faire, il le prouve en passant d'un rôle sobre et profond dans Deux jours à tuer (par exemple) à celui-ci, très physique et puissant, en n'oubliant pas au passage ses autres performances passées, présentes ou à venir.

    Bizarrement, je n'aimais guère le personnage à ses débuts, je n'ai jamais adhéré à son humour, mais l'acteur a pris une sacrée épaisseur (et peut assurer les têtes d'affiche) et il me plaît de plus en plus.

    Ici, il est absolument phénoménal, ne s'arrêtant jamais, déterminé, fonceur, courageux. Il fuit, poursuit, empli d'une rage folle.

    Il faut dire aussi que Eric Valette ne lésine pas sur les moyens.

    Tout le début du film se déroule dans l'univers carcéral, dépeint avec beaucoup de réalisme et de cruauté (certaines séquences assez ardues expliquent sûrement l'interdiction), la réalisation y est très (en)fermée, la caméra a dû mal à s'échapper de la geôle ou des parloirs, par des plans serrés sur les visages du héros ou de ses ennemis (la scène pendant le concert est sublimement - et terriblement - filmée) pour peu à peu s'évader avec son personnage vers d'autres horizons plus larges et plus ouverts.

    Le cinéaste maîtrise parfaitement son thriller de la première à la dernière seconde, et même si le scénario souffre de quelques incohérences, peu importe, on est tellement embarqués par le suspense omniprésent, tellement pris aux tripes par la folie des personnages (le héros tout à la fois traqué et traqueur, le serial killer flippant à souhait), tellement captivés par les courses-poursuites, les cascades complètement démentes (sauter sur le toit d'un train, courir à contre-courant du trafic routier), tellement pris par l'empathie que dégage Dupontel ou émus par la gamine,  qu'on ne peut qu'apprécier cet excellent divertissement de qualité, tel que le qualifie Eric Valette "Je souhaitais pouvoir offrir un vrai film d’action, «d’entertainment», sans oublier le fond et l’émotion. J’ai toujours eu envie de faire ce genre de films, c’est celui que j’aime regarder. Pour moi, le fait d’être un bon «divertissement du samedi soir» n’est pas en contradiction avec l’idée de faire de la qualité en offrant en plus quelques ambiguïtés et même un petit côté sarcastique."

    Eric Valette, tout comme Fred Cavayé (Pour elle, A bout portant) nous permet de croire que le cinéma français peut offrir de bons thrillers "à l'américaine" tout en gardant la qualité française (le soin apporté à l'image, à la photographie, aux prises de vue, aux décors, au montage - ici particulièrement étudié - ou encore de l'interprétation).

    Ce qui touche ici c'est que le héros, qui s'avère être un braqueur violent, peu à peu bascule du bon côté et nous devient sympathique, tout en ayant des parts d'ombre, puisque atteint dans ce qu'il a de plus cher (sa femme et sa fille qu'il adore), et on se surprend à vibrer pour lui et même à l'aimer tant aussi le tueur est impitoyable et terrifiant. Eric Valette s'en explique : "Depuis longtemps, je souhaitais faire un film de poursuite, avec un héros noir. J’aimais l’idée de l’amoralité du héros disposant de ses propres codes et de sa propre ligne de conduite. Le fait que l’histoire soit nourrie de plusieurs faits réels me plaisait aussi. On trouvait du coup des résonances réalistes, un côté «fait divers» associé à une vraie dimension de cinéma."

    Pour camper ce personnage hors norme, Albert Dupontel est vraiment sensationnel, tour à tour dur et endurci, puis tendre et attendri, il met dans ce rôle toute son énergie et son intensité, son jeu est d'une droiture rare et exemplaire. Le réalisateur explique pourquoi son choix s'est porté sur lui : "C'est un très grand acteur et l’un des rares en France qui pouvait en plus assumer le côté très physique du rôle. Il bénéficie en plus d’une grande affection du public, ce qui permet d’emblée de rendre ce personnage complexe sympathique. On a envie de savoir ce qui va lui arriver." Albert Dupontel revient sur la manière dont il est entré dans son rôle : "Pour jouer Franck, je me soumettais à la cadence de ce personnage physique, frénétique, violent et caricatural au bon sens du terme. Il me dominait complètement. J’étais forcé de courir comme lui, de ressentir les choses comme lui. Il m’a entraîné, ce qui m’a permis de l’habiter."

    Par ailleurs, il exécute lui-même toutes ses cascades : "Si je n’avais pas accompli mes cascades, je ne serais venu que trois jours sur le tournage. À partir du moment où l'on s’engage, il faut le faire vraiment. Exécuter moi-même les cascades me permet d’amener le jeu jusque dans l’action. La tension qui a été la mienne tout au long du film se ressent dans chaque scène." Le comédien s'est préparé avec Christian Hening, coordinateur des cascades. "À chaque fois, une doublure lumière exécutait les cascades avant moi, à la fois pour régler le cadre et me montrer ce qu’il y avait à faire. C’était une bonne façon de voir quelles difficultés m’attendaient." Une implication de l'acteur qui a valu au réalisateur des sueurs froides : "Il n’y a pas un plan où il soit doublé. J’étais à la fois tétanisé de trouille et fasciné par les risques qu’il prenait !"

    Face à lui, la belle Alice Taglioni, loin de ses rôles glamour, s'affirme, plutôt convaincante, courageuse et intrépide, s'inspirant d'une vraie policière de la Brigade des Fugitifs.

    Stéphane Debac est quant à lui vraiment effroyable en tueur marmoréen et impénétrable, à qui on donnerait le bon Dieu sans confession avec ses faux-airs de Jean-Luc Delarue, propre sur lui mais pas en lui, il vous glace le dos par son ambiguïté, sans oublier sa compagne, interprétée par Natacha Régnier, assez effrayante.

    A noter aussi la présence indispensable de Sergi Lopez toujours impeccable qui donne une touche de crédibilité à l'ensemble.

    Un film ambitieux se déroulant sur un rythme trépidant, aux scènes d'action superbement réalisées, au final poignant, un vrai bon divertissement particulièrement réussi que j'ai vraiment beaucoup aimé.


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